Othello, ou plutôt Grosloup car les enfants t’avaient surnommé ainsi, je te parlerai aussi directement car tu es, avec Ophélie la noire, un des « grands » chats de me vie.
Je t’ai choisi parce que tu m’avais toi-même choisie au cours de ce triste week-end normand qui a causé la mort de ta mère Iphigénie. Tu es venu te blottir sur mes genoux pendant que je conduisais et tu as mis ton petit moteur en route !
Non seulement tu étais adorable, d’une gentillesse exceptionnelle avec les enfants et en particulier Guillaume qui était pourtant un « petit monstre », mais tu étais aussi très beau. Blue point, avec un beau regard bleu saphir intense, tu as vite développé la fameuse collerette qui fait la beauté des mâles birmans. Tu n’aurais cependant pas été primé en exposition féline car tes gants blancs étaient un peu irréguliers…
Tu imposais naturellement ta domination auprès de « tes femmes », Ophélie puis tes filles Peluche et Rosalie : elles n’avaient le droit de manger que lorsque tu avais fini. Sans pour autant, bien sûr, que tu ne les agresses, on avait juste l’impression que tu régnais sur elles en « patriarche »!
Avec les enfants tu étais au contraire une véritable nounours. Tu avais pris l’habitude de dormir sur le lit de Guillaume. Quand je dis « le lit de Guillaume », il s’agissait en pratique de TON lit, dont tu occupais le centre, laissant à Guillaume une petite place pour se blottir entre ta chaleur et le mur !
Chacun des enfants te caressait et te prenait sur les genoux. Tu passais d’une main à l’autre, sans jamais le moindre coup de griffe ni grognement. Je découvrais alors à quel point un petit chat mâle peut être câlin. Quand les enfants rentraient de l’école, ils se précipitaient vers toi. Ils se battaient parfois pour te lover dans leurs bras ! Guillaume était néanmoins ton préféré, sans doute parce qu’il était le plus jeune. Il refusait mes câlins et s’essuyait si je lui faisais un bisou, mais toi, tu avais le droit de lui lécher tout le visage ! Il avait même pris un peu de ton odeur …


Avec tes petits ou plutôt ceux d’Ophélie, tu étais aussi un gentil papa. Tu venais les respirer et les lécher et elle te laissait faire, convaincue que tu ne leur ferais pas de mal.
Tu étais aussi un chat joueur et grimpeur. Tu passais une partie du temps sur le lit-mezzanine d’Annabelle et une partie également tout en haut des meubles de cuisine. Petit, tu escaladais mon jean par l’arrière, puis mon pull et mes cheveux jusqu’à accéder au sommet de ma tête.
Ton instinct de domination? Nous avions pourtant un arbre à chat, mais avec vous quatre et vos 16 pattes griffues… il est vite tombé en lambeaux !
Dans la très grande cuisine dinatoire, nous avions une toiture transparente. En fait, la cuisine était une cour qui avait été couverte des décennies plus tôt par les anciens propriétaires . Des pigeons venaient régulièrement se poser sur cette toiture. Tu étais alors le premier à monter sur le réfrigérateur, juste en dessous, les regardant sans cesse, désespérant sans doute de ne pouvoir « crever le plafond » afin de les attraper. Immédiatement Ophélie, Peluche et Rosalie venaient te rejoindre et …les pigeons, vraisemblablement effrayés par cette meute féline et trop stupides pour savoir qu’ils étaient en sécurité, s’envolaient à tire d’aile à votre grand dam !

Tu pesais près de 6 kg mais pas de gras, un mélange de muscle et de poils. Nous ne t’avons en effet fait stériliser que vers deux ans, après que Ophélie a subi sa césarienne. Tu commençais à respirer la bonne odeur des chaleurs de Peluche, ta fille, et nous voulions éviter que tu lui fasses des petits ! Avec ta soeur Ophélie, les risques restaient faibles, mais ta fille, non !!!

Mais surtout tu adorais boire au robinet. Quand tu étais dans la cuisine le matin, tu montais sur l’évier et nous comprenions qu’il fallait faire couler légèrement le robinet pour que tu puisses boire à la source! Quand j’étais dans la salle de bains, tu essayais aussi de boire l’eau du bain… Tu es même tombé un jour, entraînant mon téléphone portable, posé sur le bord, qui a plongé avec toi. Tu es ressorti très vite, laissant quelques griffures sur mes jambes, les seules que tu m’aies jamais faites … mais le portable s’est noyé. Bon je préférais perdre mon portable plutôt que mon adorable chat !
Tu adores l’eau et bois au robinet




Et pourtant je savais que tu nous quitterais un jour. Une vie humaine est, devons nous dire heureusement, plus longue qu’une vie féline et quinze ans est pour un chat un âge avancé. D’après les vétérinaires, ce serait environ 76 ans .
Ophélie est partie à cet âge en juillet 2013. Tu as fêté tes 80 ans (16 ans) début 2014. Tu étais toujours en forme, dormant avec Peluche, la survivante de tes filles. Au cours de l’été 2014 tu grimpais encore tout en haut des meubles de cuisine ! Quelques jours avant ta mort tu sautais encore dans la baignoire pour réclamer ton filet d’eau au robinet.
Mais tu n’auras jamais connu l’appartement du quinzième, acheté en octobre avec un crédit relais en attendant la vente de notre grand appartement . En quelques jours, début novembre, tu as commencé à t’affaiblir, à manger moins, à maigrir. Le vétérinaire a diagnostiqué un cancer, probablement digestif. Inopérable évidemment en raison de tes seize ans et demi.
Quand nous avons vu que tu commençais à souffrir, nous avons fait pour toi l’acte que j’aimerais tant pouvoir faire un jour si je venais à me trouver dans ce même état . Nous avons d’abord invité les enfants, qui ne vivaient plus à la maison, à venir te dire « au revoir » puis le vétérinaire est venu abréger tes souffrances. Grégoire, marié en 2013 et qui venait d’avoir une petite fille, t’a donné une dernière caresse. Alice et moi t’avons accompagné en pleurant dans ces douloureux derniers moments . Guillaume n’a hélas pu revenir te voir, étant en stage à Dakar. Annabelle non plus n’a pu revenir de Londres.
Tu auras eu une belle vie, tu nous as donné et as reçu de notre part beaucoup d’amour. Il reste de tout cela des souvenirs encore très vivants et même une ancienne page Facebook que les enfants t’avaient dédiée.
Avec toi, j’ai appris à quel point un petit mâle peut être affectueux et j’ai alors décidé que, si je reprenais plus tard un chaton, ce serait un petit mâle.
Peluche avait 15 ans, elle devenait aussi une chatte âgée. J’ai un peu hésité à la doter d’un petit compagnon mais j’ai préféré la laisser finir paisiblement son existence. Ce ne sera que fin 2018 que mon bébé Oula Kelbocha viendra me consoler du départ de Peluche.
En outre, à cette époque, fin 2014, je devais gérer la vente de mon appartement, le déménagement vers celui du 15 è et le stockage d’un grand nombre de choses en attendant de trouver la maison que je cherchais à acheter à Antibes.
D’une certaine manière j’étais contente de déménager car l’appartement de la rue Le Verrier était trop chargé de souvenirs de mes enfants et de mes chats pour me permettre d’ouvrir une nouvelle page de ma vie. Cette page, je l’ai écrite avec Peluche.