Rosalie victime de la médecine

Bien qu’elle ait quasiment inauguré l’an 2000, Rosalie n’est pas née « sous une bonne étoile ».

Tout d’abord, elle a failli se retrouver orpheline à la naissance.

J’étais rentrée tôt du bureau ce jour-là, ayant vu le matin qu’Ophélie commençait à chercher un endroit où mettre bas. J’ai pu ainsi accompagner Ophélie dans ce moment difficile et assister à la mise au monde de Rosalie.
Celle-ci est née assez vite, vers 18h40 et sa mère l’a normalement léchée et libérée de son placenta.

Mais les contractions continuaient et rien ne se passait…. 19h … 19h15… je commençais à m’inquiéter. Avant la fermeture du cabinet vétérinaire, un appel téléphonique avait contribué à m’inquiéter : si cela ne vient pas avant 20h et si Ophélie souffre, il faut aller faire une radio en urgence.

Ophélie étant de plus en plus fatiguée, me voici partie en voiture à la clinique vétérinaire Fregis, sur la nationale 20. La jeune fille au pair était partie et je laissais ainsi les enfants seuls à la maison (mais Grégoire, âgé de 16 ans avait mon numéro de portable et pouvait gérer et leur père habitait dans l’immeuble).

Le vétérinaire de garde emmène Ophélie et sa petite Rosalie. J’attends une heure dans l’angoisse. Il apparaît enfin, l’air préoccupé, et m’explique qu’il y avait un autre chaton, très gros et se présentant mal, qui n’avait pu être expulsé normalement et était mort in utero. Et il m’explique aussi qu’il a dû faire une césarienne à Ophélie pour l’extraire. Il me rend ma chatte encore un peu endormie et suturée. Dans mon angoisse de l’avoir perdue, je ne réalise pas tout de suite qu’il l’a même stérilisée car elle avait une déchirure à cause des contractions inefficientes.

Il m’explique aussi que la maman ne pourra sans doute pas nourrir son unique bébé les tout premiers jours, en raison de sa souffrance et que je dois donc biberonner ce boutchou toutes les 3 heures jour et nuit.

La nuit, oui, sans problème, je ferai tout pour sauver cette petite chatte, mais le jour comment faire ? Nous mettons en place une organisation avec notre fidèle femme de ménage et la jeune fille qui garde les enfants le soir, pour entourer comme il convient cette petite chatte et sa mère.

Au bout de deux jours et deux nuits, Ophélie revient vers sa fille et commence son travail de mère chatte ! Ouf!

Rosalie vers un mois avec sa mère Ophélie

Deuxième malchance de Rosalie : elle est donc seule vivante de sa portée. Heureusement Peluche (voir son histoire) est encore jeune (tout juste un an) et va assurer son rôle de grande soeur, mais Rosalie aura manqué de ces merveilleux jeux que les chatons partagent et qui contribuent à leur épanouissement.

Rosalie vers 2 mois

En outre, ce mois de janvier 2000 est pour moi particulièrement difficile car mon père, qui a 91 ans, est de plus en plus faible. Il avait fait en octobre un malaise à la résidence senior où il vivait et m’avait demandé de le prendre à la maison. Impossible car il tenait à peine debout et nous avions un escalier entre le séjour et les chambres. Je l’avais donc installé dans un appartement de location à proximité. Hélas, il commençait à perdre un peu la tête. Il perdait ses chéquiers, ne reconnaissait plus mes filles lorsqu’elles venaient le voir, oubliait le robinet ouvert et provoquait une inondation. Il ne se nourrissait plus, en dépit des livraisons de repas que j’avais organisées pour lui.

En fait, je ne savais pas qu’il ne fallait pas déraciner les personnes de cet âge et j’avais eu tort de céder à sa demande ! J’ai donc dû en janvier le faire hospitaliser sur le conseil de son médecin pour qu’il soit renutri. L’hôpital ayant vivement recommandé un placement en maison médicalisée, je venais de lui trouver une place dans un bon établissement.

J’avais ainsi bien d’autres soucis que mes chats ! Heureusement mes enfants avaient pris en affection cette petite Rosalie et s’en occupaient pendant que je courais médecins, hôpitaux et établissements pour mon père. Ce dernier nous a malheureusement quittés à l’hôpital le 2 février 2000, d’un arrêt cardiaque.

Rosalie cherchant la chaleur avec sa maman Ophélie et sa soeur Peluche

Rosalie a ainsi passé ses premiers mois entre ses parents et sa soeur. Quand elle a eu trois mois, je souhaitais la placer mais les enfants s’y étaient trop attachés et ont fait pression pour la garder. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés avec … 4 enfants et 4 chats !

Tout ce petit monde a donc partagé la maison de 2000 à 2010. Avec bien sûr des interruptions, quand Grégoire est parti deux ans en province puis en Australie pour ses études, puis quand Alice est partie en province et en Asie, Annabelle à Londres … En pratique, de proche en proche, je me suis retrouvée avec 4 chats et … des enfants de temps en temps.

Rosalie était une jolie petite birmane blue point, le portrait féminin de son père Othello. Mais elle était plus fragile que mes autre chats, peut-être parce qu’elle n’avait pas pu bénéficier du colostrum des premiers jours. Elle était très individualiste et n’a jamais développé avec aucun de mes enfants une relation aussi étroite que son Papa, qui était la mascotte de la famille. Elle se querellait souvent avec sa mère, qui pourtant s’entendait bien avec Peluche.

Rosalie vers un an

Nous avions envisagé de faire reproduire Rosalie, qui était très belle. Mais c’était difficile de trouver un mâle car ses parents étaient frère et soeur et progressivement nous avons différé ce projet, le tourbillon de la vie nous imposant d’autres priorités.

Rosalie avait des chaleurs très bruyantes et nous avons fait l’erreur de lui faire faire des piqûres. A l’époque, au début des années 2000, ces traitements étaient nouveaux et on n’en maîtrisait pas encore les risques.

Ces risques se sont révélés une dizaine d’années plus tard : Rosalie a été terrassée en deux mois par un méchant cancer de la mamelle. Malgré une intervention chirurgicale mutilante, ce cancer s’est vite généralisé et nous avons préféré abréger ses souffrances.

Elle aura quand même partagé pendant 10 ans une vie de chatte de compagnie bien entourée et bien nourrie, mais un fond de culpabilité persiste en moi . Me suis-je suffisamment informée des risques de ces piqûres ? En connaissait-on les vrais risques ? Elle a reçu en tout trois injections seulement, cela ne paraissait pas alors dangereux …

Pauvre petite Rosalie, victime de traitements sur lesquels on ne disposait pas de suffisamment de recul et qui n’aura connu ni le bonheur d’être maman comme Ophélie, en dépit de son second accouchement difficile, ni celui d’une longue vie d’affection comme sa soeur Peluche !